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Crise économique en Afrique du Nord : politiques économiques de relance et incertitudes économiques : Cas de la Tunisie

Crise économique en Afrique du Nord : politiques économiques de relance et incertitudes économiques : Cas de la Tunisie

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lundi, 24 novembre 2014 12:35

Crise économique en Afrique du Nord : politiques économiques de relance et incertitudes économiques : Cas de la Tunisie

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Introduction

Les pays d’Afrique du Nord, notamment la Tunisie et l’Egypte ont succombé suite aux événements du « printemps arabe » à une crise économique conjoncturelle mais chronique. Pour le cas tunisien qui nous intéresse, si le gouvernement tunisien ne prenne pas les dispositions et les mesures nécessaires afin de cerner les causes et les effets de cette crise, cette dernière pourrait durer. Lesdites mesures s’apparentent à des politiques économiques structurelles ou spécifiques. Le gouvernement tunisien aura ainsi à traiter la problématique suivante : Quelles politiques économiques à entreprendre au niveau de l’économie tunisienne afin de la relancer sur la voie de la croissance et du développement économiques compte tenu des incertitudes domestiques et internationales ?

A fin d’arriver à bon port, cette question sera traités en trois phases : faire un diagnostic et un inventaire des causes possibles, proposer une panoplie de politiques économiques requise et finalement analyser le poids des incertitudes économiques domestiques et internationales.

I-                   Diagnostic et attributs de la crise économique : état des lieux

1)      Les attributs de la crise

·         Récession économique prolongée depuis les évènements du « printemps arabe » et décélération de la croissance économique.

·         Augmentation de l’inflation de 4,4 % en 2010 à 6,5% en 2012 et dégradation du pouvoir d’achat notamment celui des populations les plus défavorisées.

·         Chute drastique des ressources touristiques, ce qui a eu pour implication la fermeture de plusieurs hôtels et conversion d’autres en complexes immobiliers.

·         Essoufflement des exportations notamment dans le secteur des phosphates à cause de climat social et local non favorable à l’exploitation. En outre, on note la non maîtrise des importations ce qui a engendré un niveau alarmant de la balance des opérations courantes.

·         Diminution des réserves de change et liquidations des réserves collectées à l’occasion de la privatisation partielle de Tunisie Télécom. Les réserves en devises sont passées de 140 jours d’exportations en 2010 à 100 jours en 2012.

·         Climat social général non favorable à l’investissement local ou étranger.

·         Chute de l’investissement local privé et de l’investissement direct étranger.

·         Augmentation du taux d’endettement souverain de 48,5 % en 2010 à 53,7 en 2012.

·         Augmentation alarmante du taux de chômage notamment pour les diplômés de l’enseignement extérieur : soit plus de 800 milles chômeurs en 2012 dont 200 milles des diplômés de l’enseignement supérieur.

·         Recrudescence des mouvements et des pressions sociales qui sont devenus presque structurels suite à une mauvaise compréhension de la liberté d’expression et des libertés syndicales.

·         Disparité du niveau de développement entre les régions côtières et les régions de l’intérieur, exploitée négativement et de manière prononcée par des partis politiques à discours populistes.

·         La violence salafiste et l’insécurité alarmante notamment dans les zones de tensions sociales majeures (à l’intérieur et au Sud).

·         Augmentation du déficit budgétaire de 2,6% en 2010 à 6,6 en 2012

·         Augmentation du Budget de l’Etat de 18 milliards de dinars en 2010 à 27 milliards de dinars en 2013

2)      Causes locales de la crise

·         Transition démocratique en suspens qui a freiné l’activité économique de secteur public et de la productivité et l’efficacité administrative.

·         Gestion managériale et stratégique catastrophique des ressources humaines et des deniers de l’Etat par la classe politique gouvernante ou influente.

·         Augmentation de la masse salariale dans le secteur public de 6.5 milliards de dinars en 2010 à 9,7 milliards de dinars en 2012

·         Augmentation de l’emploi public de manière non étudiée notamment pour les principales entreprises publiques tunisiennes (Tunisair, Tunisie Télécom, CPG, …)

·         Grèves et sit-in répétés dont une partie exploités politiquement.

·         Il y a plus de 800 d’actions en justice pour corruption et malversation impliquant plus de 1200 hommes d’affaires et ex-chefs d’administration. Plus de 40 hommes d’affaires ne sont pas autorisés à quitter le territoire tunisien.

·         Augmentation des subventions ou de compensation de 1,7 milliards de dinars en 2010 à 4,4 milliards de dinars en 2012

3- Causes extérieures de la crise :

·         Crise économique généralisée dans les pays de l’Union européenne, principal partenaire commercial de la Tunisie (près de 80%), spécialement la France, l’Allemagne et l’Italie, et aussi bailleurs de fonds pour l’économie tunisienne.

·         La guerre en Lybie. Près d’un demi millions de libyens ont immigré de manière permanente en Tunisie

II-                  Panoplie des politiques économiques proposées

1- Politiques économiques de relance ou de rigueur ?

Les politiques économiques de relance sont indiscutablement des politiques basées sur la politique monétaire ou la politique budgétaire.

Relancer l’économie à travers les exportations et les investissements semble être plus faisable qu’à travers la consommation à cause de l’exigüité du marché local. Bien que les économies européennes soient en crise, la relance par les exportations semble être possible vue que la Tunisie n’a pas exhorté ses quotas.

 

Certaines contraintes importantes méritent à être signalées :

·         La révision du modèle de développement demeure impertinente pour diverses raisons locales et internationales. Néanmoins, des améliorations demeurent possibles et à étudier.

·         Les difficultés chroniques à traiter la question sécuritaire, notamment celle de la contrebande et du terrorisme transnational. Des objectifs concrets nécessiterait des ressources au dépend de la sphère économique. Les politiques de terrorisme nécessiteraient également un souffle et une rigueur non partagée par la totalité de la classe politique actuelle.

·         Il faudrait ordonner les priorités économiques et sociales, car les objectifs économiques peuvent devenir contradictoires.

·         Il s’agit de savoir comment relancer l’économie, en réduisant le taux d’endettement ou le maitriser. L’euphorie ou la myopie qui pourrait nous toucher quand on est en pleine crise économique serait l’oubli dans un instant d’inconscience générale notre responsabilité vis-à-vis des générations futures.

·         Quand il s’agit de maîtriser l’inflation des prix afin de conserver le pouvoir d’achat des ménages et stabiliser la valeur de la monnaie tunisienne, notamment vis-à-vis essentiellement de l’Euro et aussi du dollar américain, on est alors dans la sphère de politique économique de rigueur.

·         Si on diminue l’endettement, il y a risque de ne pas maintenir le même niveau d’exportations, et les importations sont aussi moins compressibles et il y a risque que les réserves en devises soient affectées ce qui altèrerait à terme la solvabilité de l’Etat et sa capacité à payer son service de la dette.

·         Comme pour toute économie en développement, le nombre d’entreprises dans un secteur donné est limité (le secteur bancaire compris). Et donc la limite entre les politiques macroéconomiques et microéconomiques d’un côté et les politiques macroéconomiques et sectorielles d’un autre tendent à s’estomper.

·         L’action budgétaire est également très sensible, notamment lorsque le déficit budgétaire devient structurellement important, et lorsqu’il y a des difficultés sérieuses à collecter les ressources budgetaires.

·         Les pays qui n’ont pas la manne du pétrole ou du gaz comme c’est le cas de la Tunisie, n’ont pas les mêmes marges de manœuvre que les autres. Les ressources fiscales constitueraient la part la plus importante du budget. Les programme de relance budgétaire nécessiterait à la fois des mesures fiscales et des mesures côté dépenses. La relance budgétaire peut aider à limiter la récession, mais sa durée et sa profondeur déterminerait son coût financier, social et politique.

2- Les mesures préparatoires

·         Régler définitivement le dossier des hommes d’affaires impliqué dans le processus de justice transitionnelle (et non transactionnelle) tout ayant comme objectif ultime d’assainir le climat des affaires.

·         Assoir une poignée de fer sécuritaire contre le terrorisme, la contrebande et l’immigration illégale et durcir juridiquement les pénalités et les peines exécutoires y afférentes.

·         Sécuriser l’investissement étranger de long terme notamment vis-à-vis des partenaires européens via une diplomatie économique active.

3- Les mesures d’accompagnement

·         Essayer avec les partenaires européens à faciliter davantage la mobilité professionnelles des tunisiens vers l’Europe (visas professionnels).

·         Simplifier davantage l’environnement et les procédures administratives notamment en matière de création d’entreprises et de micro-entreprises, et en matière d’exportation.

·         Renforcer la gouvernance et la transparence au niveau de l’action gouvernementale et notamment au niveau des régions.

·         Améliorer la politique de communication du gouvernement pour les questions économiques et sociales

·         Révision profonde ou établissement d’un nouveau code d’investissement.

·         Bien piloter la réforme bancaire notamment pour les banques publiques.

4- La politique de relance économique proprement dite

·         Collecter et planifier les ressources financières pour cerner l’enveloppe financière de la politique de relance. Car la relance économique est aussi une question de moyens.

·         Bien planifier et exécuter un plan d’ajustement structurel semblable à celui de 1987 afin de rétablir les grands équilibres macroéconomiques et rendre les agrégats macroéconomiques de la Tunisie à des niveaux acceptables et tolérés.

·         Entamer une réforme fiscale productive encourageant l’investissement.

·         Redéfinir la stratégie économique du pays en identifiant les avantages comparatifs et les avantages concurrentiels de l’économie tunisienne.

·         Redéfinir la politique d’aménagement du territoire en donnant plus de moyens financier et humains aux régions.

·         Amélioration de l’action à l’emploi en développant un système d’écoute des besoins au niveau des industriels et des grands prestataires de services.

·         Diversifier davantage le tourisme tunisien et développer des mécanismes d’incitation pour le tourisme local qui est le coussin de sécurité en cas de chocs externes (c’est le cas aujourd’hui).

·         Améliorer l’accessibilité aux services de micro finances pour les populations défavorisées.

·         Améliorer les conditions de vie des populations défavorisées et communiquer efficacement là dessus.

·         Créer une stratégie gouvernementale de développement et de coopération avec la société civile et les associations à caractère économique et de développement.

                                       

III - Le poids des incertitudes domestiques et internationales

1-      Traits distinctifs et poids économique des incertitudes domestiques

L’incertitude économique domestique concerne essentiellement le capital travail à travers la productivité du capital humain. Elle toucherait également les anticipations des agents économiques (entreprises et ménages), notamment lorsqu’elle devient auto réalisatrice comme dans la sphère financière.

Plusieurs interrogations pertinentes pourraient surgir :

·         Comment l’économie pourrait absorber les chocs macroéconomiques ?

·         Comment communiquer sur la rentabilité socioéconomique des investissements ?

·         Comment évaluer efficacement et en temps opportun les politiques économiques ?

·         Comment évaluer efficacement et temps opportun les politiques publiques, qu’elles soient sociales, financières ou économiques, et maitriser le risque dans l’évaluation de l’action publique ?

L’incertitude domestique demeure en grande partie à caractère purement politique car la sensibilité réactive de la classe politique à la conjoncture économique, à la conduite et au suivi des politiques du gouvernement demeure encore à consolider.

L’incertitude politique toucherait également l’application et l’applicabilité de la nouvelle constitution notamment au niveau de la déconcentration des services publics et du pouvoir exécutif délégué aux régions, qui nécessiterait des réformes profondes quand à l’organisation administrative et l’allocation des ressources budgétaires, financières et humaines au niveau desdites régions surtout celle de l’intérieur du pays.

L’incertitude concernerait la satisfaction de la population de la conduite de la politique économique et des affaires de l’Etat en général, et ce par la coalition politique future, et si les prochains gouvernements seraient capables de contrôler et d’apaiser les tensions sociales.

On pourrait également discuter de la réforme de l’appareil statistique de l’Etat afin de permettre la conduite appropriée de la politique économique.

2-      Traits distinctifs et poids économique des incertitudes internationales

Sur le plan international qui toucherait essentiellement l’environnement économique de la Tunisie :

·         L’agenda stratégique des investissements des principales entreprises européennes et multinationales, notamment françaises italiennes et belges pourrait toucher directement l’économie tunisienne. La place que la Tunisie dans leurs cartes de restructurations, de délocalisation, d’investissements nouveaux, et de création de nouvelles branches, importe considérablement. La place de la Tunisie dans la stratégie des investisseurs internationaux en Afrique en général, en Méditerranée et en Afrique du Nord, précisément que ce soit aux niveaux des services financiers et de transport, d’industries de transformation ou encore d’irrigation de ces marchés, importe également.

·         La réaction des gouvernements des pays amis et partenaires vis-à-vis des gouvernements tunisiens en place, quelque soit leur constitution, l’appui politique qui leur sera accordé et la crédibilité des gouvernements tunisiens quant aux promesses et mesures économiques prises sur le plan local, au niveau des régions ou sur le plan international donnerait des signes aux investisseurs desdits pays quand à l’opportunité de traiter et d’investir en Tunisie.

·         L’évolution de la note souveraine de la Tunisie par les agences de notation internationales, donnera plus ou moins de facilité au gouvernement tunisien à financer le budget de l’Etat et, à aller sur les principaux marchés financiers internationaux, et par conséquent exécuter des plans de relance économiques ou budgétaires plus ou moins ambitieux. L’évolution de ces notes donnerait également des signaux aux investisseurs internationaux quand à l’opportunité d’investir sur le site « Tunisie ».

·         L’incertitude internationale ou encore régionale concerne également la stabilisation économique et politique des pays voisins (surtout la Libye).

·         L’évolution des processus d’intégration économique régionale ou internationale, à savoir avec l’Union Pour la Méditerranée, et de l’Union du Maghreb Arabe, aurait des répercussions directes sur la coordination des politiques économiques et de l’opportunité d’investir dans des marchés moins cloisonnés et plus étendu que l’espace économique tunisien au sens stricte.

Conclusion

La Tunisie a un besoin considérable de financement budgétaire et d’investissements directs étrangers. « Un plan Marshall », c'est-à-dire un plan d’investissement d’envergure de la part des partenaires de la Tunisie, bien étudié et bien présenté pourrait arranger les maux d’un pays déstabilisé et une jeunesse qui n’a plus de confiance dans les autorités gouvernantes et encore moins dans la classe politique actuelle. D’ailleurs, presque tous les sondages d’opinion récent à propos des prochaines élections présidentielles et législatives prochaines en témoigne.

Car le fond de la crise économique actuelle est purement politique. En effet, toute entreprise humaine qu’elle soit économique ou sociale est basée essentiellement sur l’espoir en un avenir meilleur. Travailler méthodiquement sur ce concept serait plus efficace et plus productif que le plus perfectionné des modèles économiques.

Le plan de relance économique a besoin également d’un gouvernement fort et légitime capable d’achever la réconciliation nationale et l’engagement de réformes structurelles qui ne pourraient porter leurs fruits que dans une décennie et plus. Les politiques de rigueur ou de redistribution des ressources nécessitent parfois des mesures impopulaires que nul parti politique (dans l’état actuel) ne veut ou ne peut supporter. Ledit gouvernement devrait également améliorer la visibilité des investisseurs locaux et internationaux à travers une pratique économique mieux exercée à travers une gouvernance institutionnalisée et des ressources bien gérées surveillées par une presse libre et non partisane.

Références

·   Fiche d’action pour la Tunisie (Programme d’appui au développement des Zones Défavorisées, Union Européenne, 2011

·         Rapport d’évaluation du Programme d’Appui à la Relance Economique et au Développement inclusif, Banque Africaine de développement, octobre 2012

·         « The Revolution in Tunisia : Economic challenges and Prospects », Economic Brief, Banque Africaine de Développement, 11 mars 2011

·         « Tunisie : 9 propositions pour relancer le développement économique », Tunisie/Méditerranée, Institut de Prospective Economique du Monde Méditerranéen, Septembre 2011

·         Mondher Ben Ayed, « The dynamics for Transition in Tunisia and their implications on the economy », Economies in Transition, Transition lecture series, Legatum Institute, juin 2013

Lu 831 fois Dernière modification le mercredi, 16 août 2023 16:40

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