Extrait de mon livre "Union Pour la Méditerranée : intégration économique et attractivité de la Tunisie aux investissements directs étrangers".
Introduction
L’intégration méditerranéenne est-elle aujourd’hui une utopie ? La méditerranée a été le berceau des civilisations mais aussi des conflits mondiaux majeurs. Ce n’est nullement un constat contemporain mais ancré dans une lecture transversale profonde de l’histoire de la civilisation humaine. Cette mer presque fermée des terres du milieu continue à faire couler plus d’encre que les projets d’intégrations rivaux étant donné que la problématique est difficile et les différentes facettes du problème se sont imbriqués pendant des millénaires et non des décennies.
En des termes plus pragmatiques, est ce qu’une intégration à l’Européenne est possible en méditerranée ? Et où en sommes-nous aujourd'hui ?
En plus, de quelle Méditerranée parle-t-on ? , la Mer Égée la Mer Noire, la Mer Adriatique sont elles comprises dans ce qu’on appelle communément la Méditerranée ? Les pays de l’Union Européenne n’ayant pas de frontières avec la Méditerranée sont-t-ils considérés politiquement parlant du moins, des pays méditerranéens, dans la mesure où ils sont déjà à un niveau d’intégration de plus en plus proche de l’intégration politique, dernière phase d’intégration selon Balassa ? Et dans quelle mesure une intégration euro-méditerranéenne est possible avec la crise d’endettement aiguë des pays méditerranéens du Nord et les secousses politiques d’envergure dans la méditerranée du Sud.
I- Processus de Barcelone et l’UPM
- Historique du processus de Barcelone
Un partenariat a lié lors d’une conférence à Barcelone en 1995, 27 pays des rives Nord, Sud et Est de la méditerranée, dans le but de former en 2010-2012, une zone de libre échange économique et un espace de stabilité politique. Le partenariat de Barcelone a impliqué 15 pays européens (ceux qui sont membres de l’Union Européenne) et 12 pays de l’est et du sud de la méditerranée[1]. Il touchait 3 volets : le volet politique et sécuritaire, le volet économique et financier et le volet social, culturel et humain. Le processus de Barcelone a été appelée « le partenariat euro-méditerranéen ». Il s’agit d’éviter de nouvelles lignes de division entre l’UE et ses partenaires. L’approche de l’UE vis-à-vis de ses voisins non-membres a été qualifiée de postmoderne[2] . Les relations avec les voisins partenaires s’insèrent dans un multilatéralisme régional.
- L’émergence de l’Union Pour la méditerranée
Schéma 1 : Carte de l’Union Pour la Méditerranée (UPM)[3]
L’Union Pour la Méditerranée (UPM) a été introduite sur l’initiative de la France en 2008 en proposant de nouvelles politiques incluant les nouvelles variables de la Politique Européenne de Voisinage (PEV). Secrétariat de l’Union pour la Méditerranée a été créé par 43 Chefs d’États et de gouvernements euro-méditerranéens le 13 juillet 2008 à Paris. L’UPM vise à donner plus de consistance dans les relations extérieures de l’UE, dans une perspective de jeu à somme positive. L’UPM se base sur des principes pragmatiques à savoir la géométrie variable et la co-appropriation. Elle se base sur des projets concrets. D’où l’approche microéconomique prédomine sur les considérations macro-économiques car elles ne touchent pas les politiques économiques mais uniquement certains secteur d’activités d’intérêt méditerranéen commun.
L’UPM et les thèmes prioritaires
Les thèmes actuellement prioritaires dans le choix des projets à financer sont les suivants :
- Développement des Entreprises
- Transport & Développement Urbain Durable
- Énergie
- Eau & Environnement
- Enseignement Supérieur & Recherche
- Affaires Sociales & Protection Civile
Le processus semble être axé aujourd’hui sur l’impératif de cohésion des pays méditerranéens. Les considérations économiques sont centrées sur la question énergétique (le plan solaire méditerranéen), les problèmes d’environnement et le développement des entreprises. Il est clair que cette approche par projets est optimale quand les questions macro (politiques et économiques) sont parfois sévères notamment de l’écart de développement entre les pays, conflit du moyen orient et récemment les évènements du « Printemps arabe ».
Les obstacles inhérents à l’Union pour la Méditerranée
En effet l’impact de l’UE sur le développement socio-économique a été qualifié de réduit. Les principaux obstacles à la coopération euro-méditerranéenne, les éventuelles asymétries et décalages économiques, politiques et sociaux[4]. En effet, le principal décalage est que les pays européens sont déjà engagés dans une Union Monétaire et compte évoluer vers des stades plus avancés d’intégration. D’autre part, l’élargissement de l’Union Européenne vers l’Est, avait concentré les ressources de coopération vers ces pays au dépend des pays méditerranéens du sud.
Le processus a buté sur des difficultés économiques structurelles liées aux mécanismes de marché et aux réformes économiques mais aussi au blocage du processus de paix au Moyen Orient.
Bien que les pays méditerranéens du Sud ont vu dans le processus de Barcelone, une opportunité pour établir un contrepoids dans le processus de paix, un ayant un droit de regard sur la « question palestinienne », les européens ont été réticents à inclure le conflit du Moyen-Orient pour être discuté dans l’Union Pour la Méditerranée. Néanmoins, la vision méditerranéenne reste pour le moment dessinée par les partenaires européens plutôt que par les méditerranéens du sud. Cette vision européenne reste entachée par la « dimension nordique » d’un UE qui perçoit l’UPM comme un élément de la politique étrangère européenne, plutôt qu’un processus d’intégration autonome ayant ses propres dynamiques, ses propres instruments et son propre contexte géo-politique.
La vision socioéconomique européenne demeure concentrée sur les questions sécuritaires et de migration. Elle n’a pas réussi à promouvoir une vision de développement économique au Sud et de croissance économique au Nord, dans une optique réelle de jeu à somme positive. Cette vision sécuritaire a été consolidée lors des évènements du « Printemps arabe » qui ont déstabilisé complètement la Tunisie, l’Egypte, la Lybie et la Syrie.
La « dimension nordique » concept de l’agenda européen en Mer Baltique, introduit par la Finlande en 1997, par parallélisme au processus de Barcelone, il s’agit d’un processus semblable impliquant l’UE, l’Islande, le Norvège et la Russie.
L’UE a relativement échoué dans certains aspects de ses relations avec les partenaires du Sud à cause d’une « identité européenne » évolutive mais autiste qui souffre d’une difficulté majeure à modifier et adapter soi-même, pour se fondre dans le contexte social, géopolitique et culturel méditerranéen. En d’autres termes, « l’identité internationale de l’UE est devenue un obstacle pour la coopération avec les pays voisins »[5].
- Dialogue en Méditerranée Occidentale 5+5
Le dialogue en Méditerranée occidentale a connu plus de succès et sa continuité a été consacrée par une volonté politique de part et d'autre de la méditerranée.
Le dialogue 5+5 concernent les pays suivants :
- Pour la rive nord : l’Espagne, la France, Italie, Malte et le Portugal
- Pour la rive sud :l’Algérie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie et la Tunisie
Il a commencé bien avant le processus de Barcelone soit en 1990. Il a capitalisé deux sommets des chefs d'État et de Gouvernement.
- 1ersommet : Tunis, 6 et 7 décembre 2003
- 2esommet : Malte, 5 et 6 octobre 2012
Les thèmes principaux dudit dialogue demeurent souvent les questions sécuritaires et la coopération économique.
Ce dernier sommet a appelé au « renforcement des synergies entre les organisations internationales et les enceintes de dialogue existantes en Méditerranée à savoir :
- dialogue 5+5,
- Union pour la Méditerranée,
- Politique européenne de voisinage,
- Union du Maghreb arabe,
- le partenariat de Deauville[6].
Les conférences des ministres des affaires étrangères se sont établies plus régulièrement[7] :
- Rome, octobre 1990
- Alger, octobre 1991
- 1reconférence : Lisbonne, 25 et 26 janvier 2001
- Tripoli, mai 2002
- Sainte-Maxime, 9 et 10 avril 2003
- Oran, novembre 2004
- Malte, juin 2005
- 6econférence : Rabat, 20-21 janvier 2008
- 7econférence : Cordoue, avril 2009
- 8econférence : Tunis, 15 - 16 avril 2010
- 9econférence : Rome, 20 février 2012
Les activités sectorielles du dialogue cinq plus cinq est très diversifiée. Elles touchent à la l’intérieur, à la défense, aux transports, à la migration, à l’éducation, à l’environnement, et aux énergies renouvelables.
L’annexe n° I détaille les dates des réunions sectorielles des ministres concernés. Ces efforts diplomatiques et techniques ont, en outre, soufflé la catalysation des IDE méditerranéens du Nord vers le Sud. Ces IDE européens sont jugés indispensables pour la croissance et le développement économiques dans les pays méditerranéens du sud.
[1] Algérie, Chypre, Egypte, Jordanie, Liban, Malte, Maroc, Syrie, Palestine, Tunisie, Turquie et Israel.
[2] Smith M.2003, Maull 2006
[3] Source : www.diploweb.com
[4] Voir Yasmine Guessoum, « Mesure du degré de convergence politique, économique et sociale en Méditerranée », Centre d’économie et de Finances Internationales CNRS, Université de la Méditerranée Aix-Marseille, Février 2003
[5] Voir Elisabeth Johansson-Noguès, « Is the EU’s Foreign Policy Identity an obstacle ? The European Union, the Northern Dimension and the Union For the Mediterranean », European Political Economy Review, N°9 (Automne 2009), p37
[6] Source : www.diplomatie.gouv.fr
[7] Source : Wikipedia et www.diplomatie.gouv.fr
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